Si la stratégie est si importante, pourquoi ne lui consacrons-nous pas plus de temps ?
Presque tous les dirigeants souhaitent consacrer plus de temps à la réflexion stratégique. Dans une enquête menée auprès de 10 000 cadres supérieurs, 97% d’entre eux ont déclaré qu’être stratégique était le comportement de leadership le plus important pour la réussite de leur organisation*.
Pourtant, dans une autre étude, 96% des dirigeants interrogés ont déclaré qu’ils manquaient de temps pour la réflexion stratégique*. Nous sommes tous oppressés par les réunions et submergés par les emails (126 par jour en moyenne, selon une analyse du Radicati Group) mais comment expliquer un tel décalage entre les objectifs déclarés et les actions ?
L’un des problèmes réside dans les schémas mis en place, même inconsciemment, par les entreprises. Il existe souvent une pression culturelle qui incite à travailler de longues heures. Des recherches ont montré que les employés qui travaillent plus de 50 heures par semaine gagnent 6% de plus que leurs autres collègues. Le fait d’être « collé » à son bureau peut vous aider à traiter plus d’emails ou de tâches opérationnelles, mais c’est rarement une recette pour une réflexion stratégique innovante. Il a même été prouvé que la productivité des employés diminue dès qu’ils travaillent plus de 50 heures par semaine. Selon une étude de l’université de Stanford, ce qui semble stimuler la pensée créative, ce sont des activités telles qu’une courte promenade, surtout à l’extérieur. Mais ce comportement n’est pas encore accepté dans toutes les entreprises.
Un autre obstacle à la réflexion stratégique peut être d’ordre interne. Les recherches montrent que, du moins aux États-Unis, l’activité est un signe de statut social. Comme l’explique Silvia Bellezza, de la Columbia Business School, « en disant aux autres que nous sommes occupés et que nous travaillons tout le temps, nous suggérons implicitement que nous sommes indispensables ». Outre les exigences très réelles qui pèsent sur nos emplois du temps, il y a donc aussi une incitation à se laisser aller à la frénésie : c’est un marqueur de notre réussite professionnelle.
Compte tenu de ces pressions qui nous poussent à l’affairisme et nous éloignent de la réflexion stratégique, Dorie Clark, dans son livre « The Long Game : How to Be a Long-Term Thinker in a Short-Term World (HBR Press, 2021) » partage trois façons de créer l’espace nécessaire à la stratégie.
Tout d’abord, il est important de se rappeler que la réflexion stratégique n’exige pas nécessairement beaucoup de temps. Avoir une idée ne prend pas de temps mais plutôt un espace psychique.
Il est beaucoup plus facile d’entamer une réflexion stratégique si vous pouvez préparer le terrain en faisant des choses simples comme noter toutes vos tâches en suspens pour libérer votre esprit.
Deuxièmement, il est utile de savoir clairement comment vous utilisez votre temps. Il est fort possible que vous puissiez combiner, différer ou externaliser certaines tâches pour gagner quelques heures par semaine, pour sortir de l’agitation quotidienne et vous consacrer à la réflexion stratégique.
Enfin, en changeant notre façon de concevoir l’affairisme – d’un marqueur de statut à une marque de servitude – il peut devenir plus facile de dire non au défilé d’obligations interminables qui se bousculent chaque jour.
En prenant conscience des facteurs qui vous dissuadent de consacrer du temps à la stratégie et en prenant des mesures, vous pouvez atteindre un objectif que vous, et 97 % des autres dirigeants, reconnaissez comme essentiel.
*Harvard Business Review